Je ne suis pas un fan de Maxime Chattam, ayant essayé plusieurs fois ses romans sans avoir été convaincu. C’est sur la recommandation de Dup de Book en stock que je me suis attaqué au dernier en date : Léviatemps.
Nous sommes en plein Paris, en 1900, alors que l’exposition universelle va bientôt ouvrir ses portes. Guy
de Timée est un journaliste reconnu, devenu romancier à succès, qui connaît le drame de la page blanche. Son inspiration s’est tarie, et pourtant sa volonté est de pouvoir écrire un livre à
l’égal de Arthur Conan Doyle, qui représente tout ce vers quoi il veut tendre.
Pour retrouver son inspiration, il va falloir qu’il se plonge dans les bas-fonds de Paris, pour se mettre
en danger, mais aussi pour rencontrer la matière même de sa future œuvre. Du jour au lendemain, il abandonne sa femme et sa famille et loge dans le grenier d’une maison close, chez Julie de
Sailly. C’est une maison de bonne réputation où une partie des bourgeois viennent pour assouvir leurs besoins sexuels, ou pour faire bonne figure en société en bonne compagnie.
Un soir, l’une des jeunes prostituées Milaine est retrouvée assassinée. Son corps est tendu en arc de
cercle, sa peau sue du sang et ses yeux sont complètement noirs. Quand la police débarque, l’interrogatoire montre que les deux policiers n’en ont rien à faire de cette affaire. Par contre, le
sens de leurs questions montre qu’ils ont connu un ou des cas similaires vers la rue Monjol, dans un quartier situé derrière Ménilmontant où tous les pauvres habitent dans des conditions
déplorables.
Guy va alors prendre en charge l’enquête, aidé par Faustine, l’une des pensionnaires de la maison close et
de l’inspecteur Perroti secrètement amoureux de Milaine. Ils vont se rendre compte que le cas de Milaine n’est pas le seul, qu’il y a au moins trois meurtres horribles qui sont survenus dans les
deux derniers mois. La traque du mal peut donc commencer dans le Paris du début du siècle dernier.
Maxime Chattam est reconnu pour être un auteur dont l’obsession est le mal et qui sait raconter des
histoires avec des personnages à la psychologie complète (à défaut d’être complexe, mais c’est mon avis). J’ai commencé par l’âme du mal, que je n’ai jamais fini car c’était trop sanguinolent
pour moi, j’ai lu avec plaisir Les arcanes du chaos même si c’était très loin de l’extraordinaire Le bibliothécaire de Larry Beinhart (sur un sujet similaire) et j’ai détesté Prédateurs que j’ai
trouvé trop gratuitement démonstratif. Dup m’avait assuré que celui-ci n’était pas sanguinolent, et son article m’a convaincu de me jeter à l’eau.
Eh bien, ce roman est le meilleur que j’ai lu de lui. Je me suis laissé prendre par l’intrigue, bien menée grâce à un personnage principal dont
les qualités d’auteur ont permis à Maxime Chattam de construire son livre. Guy a une façon d’approcher la psychologie du tueur en s’appropriant ses faits. Avec son esprit de déduction, il arrive
ainsi à avancer, grâce aussi à son double féminin Faustine. J’ai pris beaucoup de plaisir à lire ces aventures, car je dois reconnaître que le style est fluide, facile à lire, avec des dialogues
toujours justes.
Ce roman est aussi un hommage aux romans populaires avec un héros qui se cherche, en suivant une ligne qui le mènera au pire. Avec un héros
profondément bon attiré par le mal, aidé de deux acolytes qui le soutiennent et le poussent, on retrouve tous les ingrédients pour passionner le lecteur dans un cadre magistral : celui du
Paris du début du vingtième siècle et ses innovations qui vont bouleverser le monde moderne tel que nous le connaissons.
Maintenant que j’ai listé les arguments positifs, voici ceux pour lesquels je mets un bémol pour ce roman. Le contexte justement me parait
esquissé, j’aurais aimé plus de descriptions de ce Paris de l’exposition universelle, plus que ces quelques touches par ci, par là. On est loin d’un roman comme l’Aliéniste de Caleb Carr par
exemple, qui nous plonge dans le monde du début du vingtième siècle. Ensuite, la technique de Maxime Chattam pour faire avancer son intrigue est ce que j’appellerai celle du Petit Poucet. Je
trouve une pierre blanche (un indice ou une idée) donc j’avance, puis je m’arrête, je réfléchis, je fais la synthèse de ce que j’ai trouvé, puis je trouve une nouvelle pierre blanche, et ainsi de
suite. Je ne vais pas dire que cela m’a gâché ma lecture, mais le principe est parfois trop voyant.
Pour être honnête, j’ai bien aimé ce roman, qui me réconcilie avec Maxime Chattam. J’ai apprécié de suivre les aventures de Guy et Faustine,
j’ai aimé être mené vers de nombreuses fausses pistes. Je regrette juste qu’avec un tel sujet, l’auteur n’en ait pas fait un chef d’œuvre. Cela n’empêche pas que ce roman m’aura fait passer un
bon moment et j’en remercie encore ma copine Dup.