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5 mars 2014 3 05 /03 /mars /2014 18:22
Sans crier gare surgit la nuit de Bernard Pasobrola (Rail noir)

J’avais beaucoup aimé Mortelle hôtesse, alors je récidive avec son dernier roman en date paru aux éditions du Rail Noir, un roman qui fait réfléchir sur la manipulation des cerveaux.

Stéphane Anglade est un homme qui souffre d’une amnésie sélective, suite à un accident vasculaire cérébral. Il est traité dans un hôpital psychiatrique situé proche de Grenoble. C’est aussi un homme qui porte sa croix, la mort de sa fille dans un attentat à Montpellier, où un magasin a pris feu. Quand Shila, une nouvelle patiente, atteinte de crise d’épilepsie arrive, ils vont se lier, se soutenir et reprendre l’enquête de cet attentat dans un pays en proie à une révolution.

En effet, depuis que le peuple a perdu la foi dans ses hommes politiques, depuis que le vote blanc est devenu majoritaire, deux partis se font la guerre, le parti d’extrême droite et le Parti Social d’Avenir Républicain. Ce dernier prône l’évolution de la société grâce à la science, en défendant une thérapie à base de manipulation cervicale pour éliminer le mal. Parétu, le leader du PSAR, a en vue la clinique de neurothérapie vibratoire dirigée par Jean Reverte.

Ce roman est à la fois un roman de personnages forts mais aussi une vraie réflexion sur où peut aller une société et la façon dont on peut manipuler les masses. Dans un monde en ruine, il y a une vraie opposition entre ces gens, malades et perdus, et le monde extérieur oppressé par l’armée omniprésente, les hélicoptères qui tournent à la recherche de dissidents. Si le style se veut froid et direct, c’est pour mieux faire ressortir les sujets importants du roman : la manipulation des masses.

Alors que l’intrigue se déroule dans un futur proche, Bernard Pasobrola en profite pour fouiller beaucoup de thèmes et en particulier la façon dont les politiques cherchent à diriger les opinions, à éliminer ceux qui ne pensent pas « bien », ou à maitriser ceux que l’on appelle les terroristes.

D’une enquête qui peut paraitre anodine au départ, l’enchainement est parfaitement logique pour démonter tous les rouages, les guerres intestines entre scientifiques à des fins peu avouables … mais sans le montrer. Car, quoi de plus facile que de diriger une population quand on maitrise son cerveau. Bernard Pasobrola en profite pour montrer toutes les thérapies existantes, justifiées par les scientifiques de renom et construit son roman comme une dénonciation contre la libre expression, la libre pensée.

Des personnages attachants à l’ambiance toujours oppressante par la présence de l’armée, le passage incessant des hélicoptères, tout concourt a donner un ton qui met le lecteur sous pression. De ce roman, qui montre si bien une société en déliquescence, Bernard Pasobrola nous demande ouvertement de réfléchir vers où nous voulons aller, de garder notre libre arbitre, et de choisir notre futur. Voilà un roman très bien fait, intelligent et prenant et que vous devez lire.

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4 mars 2014 2 04 /03 /mars /2014 18:24
L'information du mardi : Idées de polars

Le sursaut du faible, SDF de Nathalie De Bois (Mélibée)

À Bruxelles, Charles, un policier ayant tout perdu, aussi bien son travail que sa famille, se retrouve à la rue. Il se lie alors avec des personnages épatants. Rien n’est ni rose, ni parfait, mais le plus dur reste à venir. La mort suspecte d’une de ses connaissances va ressusciter en lui son instinct de flic. Il va devoir enquêter par ses propres moyens… les moyens d’un sans domicile fixe ! Nathalie DE BOIS est née à Liège et vit actuellement à Bruxelles. Après des études en formation artistique, elle cumule les jobs de tout genre en attendant de réussir ses examens pour rentrer dans la police. Près du but, son projet est tragiquement interrompu par un accident endommageant sa colonne vertébrale. Sa vie est bouleversée. Le passage d’une vie simple à un quotidien de douleur la mène à adopter une autre perspective pour se sentir exister : l’écriture devient pour elle une évidence.

L'information du mardi : Idées de polars

Sérum Saison 1 – L’intégrale de Henri Loevenbruck et Fabrice Mazza

1773 : Mesmer invente l’hypnose.

1886 : Freud invente la psychanalyse.

2012 : Draken invente le sérum.

Une injection.

Sept minutes pour accéder au subconscient. Un simple carnet pour décrypter des visions fantasmagoriques et seulement quelques jours pour empêcher le pire. Arthur Draken est-il psychiatre de génie ou dangereux criminel ? Alors que s’enchaînent meurtres, enlèvements et conflits politiques, comment ne pas mettre en doute la parole de Draken ?

Six épisodes sous pression, réunis en un seul volume, pour une enquête hors norme !

Henri Loevenbruck est l’auteur de quatorze romans. Ses quatre derniers thrillers, publiés aux Éditions Flammarion, ont été traduits dans plus de dix langues.

Fabrice Mazza est l’auteur d’une dizaine de livres sur les énigmes et les jeux de réflexion chez Marabout dont Le grand livre des à énigmes, La boite à énigmes, Énigmes : pas de panique, c’est toujours logique…

L'information du mardi : Idées de polars

Le Jeu de l'Assassin de Nils Barrellon (City)

Le cadavre d'une femme poignardée avec une violence extrême est retrouvé sur les rails, près de la gare du Nord. Elle n'est que la première victime d'une longue liste. A chaque fois, les proies sont des prostituées dont le tueur sème les corps dans différents quartiers populaires de Paris. Des meurtres sordides sans motif apparent. Le commissaire Kuhn n'a pratiquement aucun indice et l'enquête s'enlise.

Jusqu'à ce que le meurtrier fasse en sorte que l'on retrouve sa trace. Il relance la partie dans un jeu macabre avec la police. Un jeu de piste infernal au dénouement inattendu...

L'information du mardi : Idées de polars

Le garage de Sébastien Gendron (Storylab)

La série évènement

Les éditions StoryLab en partenariat avec OÜI FM présentent LE GARAGE, une série littéraire en 6 épisodes de Sébastien Gendron. Entre humour noir et suspense accrocheur, ce feuilleton-thriller s'inscrit dans la lignée de séries TV telles que Breaking Bad ou Sons of Anarchy. De l'angoisse, un soupçon de trash et une pointe d'humour : un cocktail on the "rock" à tester dès maintenant !

À 17 ans, Gabriel reçoit une balle en pleine tête. Défiguré, il abandonne tout espoir d'être comédien et sombre dans la drogue. Vingt-cinq ans plus tard, il a refait sa vie. Mais le passé revient en force... Et avec lui, le désir de vengeance.

Au bout de sa route, un garage crasseux et isolé. Le genre d'endroit où il faut éviter de mettre les pieds.

Pour plus d'informations, allez ici

L'information du mardi : Idées de polars

L’insigne du boiteux de Thierry Berlanda (La Bourdonnaye)

La Bourdonnaye est une maison d’édition numérique et d’impression à la demande lancée en 2011 par Benoit de la Bourdonnaye. En février 2014, les éditions La Bourdonnaye inaugurent une nouvelle collection de polars/thrillers/romans policiers sous le nom Intrigues, avec le polar de Thierry Berlanda : L’Insigne du Boiteux.

Un assassin, qui se fait appeler le Prince, exécute des mères de famille sous les yeux horrifiés de leurs jeunes fils âgés de 7 ans. Opérant à l’arme blanche avec une rare sauvagerie, le meurtrier taille ses victimes en lanières. Telle est la punition qu’il inflige. Mais qui punit-il ? Et de quoi ?

Pour répondre à ces deux questions fondamentales, le commandant Falier s’adjoint les services du professeur Bareuil, spécialiste des crimes rituels, « retraité » de la Sorbonne, et de Jeanne Lumet, qui fut sa plus brillante élève. Or la jeune femme est mère d’un petit garçon de 7 ans. Détail qui n’échappera sans doute pas au Prince…

Dès les premières pages, l’auteur nous plonge dans une descente vertigineuse au fin fond de la folie meurtrière. Certaines figures cauchemardesques prennent vie dans notre réel. Le Prince est de celles-là. Gageons que cette créature qui se nourrit de nos peurs hantera longtemps nos mémoires.

Thierry Berlanda est écrivain, philosophe, auteur-compositeur et conférencier. Ses romans explorent des genres très différents. L’Insigne du Boiteux est le premier qui paraît aux éditions La Bourdonnaye.

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2 mars 2014 7 02 /03 /mars /2014 18:19
Oldies : La guerre des nains de Danielle Thiery (Belfond)

Cela faisait un petit moment que je voulais découvrir un roman de Danielle Thery, car je voyais ses ouvrages dans les librairies, sans arriver à me décider sur un titre. Alors j’ai choisi un titre qui est sorti en 1997, et qui a été réédité chez Belfond en juin 2013. Plongée crue dans les banlieues parisiennes.

L’auteur :

Danielle THIERY est née en Cote d’Or en 1947. L’ une des premières femmes de la police française à avoir accédé au grade de commissaire divisionnaire, elle a suivi une carrière multiforme, s’intéressant aux mineurs en danger, aux stupéfiants, au proxénétisme, en passant par la police criminelle et la lutte antiterroriste ciblée sur le transport aérien et ferroviaire.

Elle a écrit pour la série télévisée Quai n° 1 (France 2). Elle est l’auteur de 17 ouvrages : polars, romans policiers jeunesses, documentaires. Elle a été récompensée par plusieurs prix polar à Cognac, prix Exbrayat … Elle a notamment obtenu le Prix du Quai des orfèvres 2013 pour son roman Des clous dans le cœur (Fayard)

(Source www.Zonelivre.fr)

Quatrième de couverture :

Quand son pote Olive s'écroule en pleine partie de paint-ball, Biboul croit d'abord que le jeu continue. Mais il s'aperçoit que l'autre est en sang et il file chercher des secours... A son retour, Olive a disparu. Embarqué par qui ? La petite bande de copains est effarée mais tétanisée. L'enlèvement aurait-il à voir avec la cachette d'armes qu'ils ont découverte récemment, dans une précédente partie ? Ils n'imaginaient pas, alors, qu'ils étaient les témoins de quelque chose qu'ils n'auraient jamais dû voir, et se retrouveraient mêlés à des trafics glauques entre leaders islamistes, policiers véreux, et un couple de jeunes ados de leur âge qui se la jouent Bonnie & Clyde : Fleur et Antony... mais vont eux aussi être dépassés par leur jeu. Olive se retrouve enfermé dans une cave avec Fleur, elle aussi embarquée par la mystérieuse bande après une course-poursuite meurtrière qui coûte la vie à Antony.

Une descente aux enfers qu'un inspecteur désespéré, Le Guénec, va accompagner avant d'en dénouer les fils, avec l'aide d'un gosse, Jamal, dit Jaja, fou de vélo et de sa cousine Naïma, et prêt à tout pour la sortir des griffes de la bande d'islamistes qui gravitent autour de son frère, Sélim. Ultra-violence, amour à mort, mais aussi amour tout court et profonde humanité sont les ressorts de ce polar dense, imbriqué dans une actualité complexe qu'il n'hésite pas à affronter sans tabous.

Mon avis :

Ce deuxième roman de l’auteure a été écrit à la fin des années 90, et veut montrer, à travers une intrigue à plusieurs personnages, un état de fait de la montée de l’intégrisme. De trois faits divers ayant lieu simultanément, une partie de paint-ball qui se termine mal, une attaque d’un commissariat qui se termine par le vol d’une voiture de police et d’armes, et une attaque de fourgon blindé, Danielle Thiéry alterne les points de vue et nous malmène grace à une style rapide et sec.

L’auteure nous concocte donc un roman où tout va très vite (l’intrigue se déroule sur moins d’une semaine) et déroule son scenario sans prendre position et en restant très factuelle. Cela donne donc un roman où on est plus proche du roman d’action que du roman policier ou du roman social. Et comme il se doit, cela se lit vite, très vite.

Le seul bémol que j’y apporterai, c’est que j’aurais aimé des personnages mieux dessinés, et surtout que l’on cherche à nous proposer une explication sur le fait qu’à cette époque-là, des jeunes se sont enrôlés dans une guerre qui n’était pas la leur. Peut-être n’y a-t-il pas de raison, mais ce sont des questions qui m’interpellent et auxquelles je n’arrive pas à trouver de raison.

Donc, ceux qui cherchent un roman d’action réaliste, qui va vite, situé dans un contexte contemporain difficile de l’intégrisme savent ce qu’il leur reste à faire : Lire la guerre des nains. Mais il ne faut pas demander plus à ce bon polar qu’une intrigue rigoureuse et bien menée.

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26 février 2014 3 26 /02 /février /2014 18:09
Le chouchou du mois de février 2014

Non seulement le mois de février est court, mais en plus c’est un mois en plein cœur de l’hiver où il fait froid et gris. Alors quoi de mieux que de démarrer le mois par une lecture distrayante et hilarante. C’est ce que j’ai fait avec Les enquêtes du commissaire Léon 3 / 4 de Nadine Monfils (Belfond). Une nouvelle fois, Nadine Monfils démontre avec Il neige en enfer et Le silence des canaux qu’elle écrit des intrigues très bien construites et que les éclats de rire sont toujours au rendez vous. Du pur plaisir !

Ce mois de février est aussi l’occasion de souligner un superbe coup de cœur, un de ces romans à la subtilité rare, avec des personnages formidables et une histoire racontée comme un morceau de jazz. Il s’agit bien entendu de Kind of black de Samuel Sutra (Terriciae) et c’est à ne pas rater.

Sur Black Novel, il y a des auteurs que l’on adore. C’est le cas de Sam Millar, dont on aura encore pu apprécier l’aspect visuel de son écriture au travers du premier tome d’une nouvelle trilogie Les chiens de Belfast (Seuil Policiers). Quant à Michaël Mention, son talent multiforme fait de son Fils de Sam (Ring) un livre à la croisée du thriller et de l’enquête journalistique. Assurément deux auteurs, deux sujets, deux obsédés du style, deux livres à découvrir et à dévorer.

Comme d’habitude, il faut souligner les premiers romans de ce mois. Un doigt de politique de Ben Orton (Les éditions létales) propose pour un prix modique (moins de 5 euros) un personnage haut en couleurs pour des aventures polardesques et à la limite du burlesque. Ressacs de David James Kennedy (Fleuve Noir) m’aura permis de faire la connaissance d’un nouvel auteur qui a un style très imagé et qui est promis à un bel avenir. Ne passez pas à coté de Témoin de la nuit de Kishwar Desai (Editions de l’Aube), moins pour son intrigue que pour sa charge contre la société indienne et les tortures institutionnalisées faites aux femmes. Enfin, Le sang des maudits de Leighton Gage (Points Seuil) m’aura fait découvrir le Brésil de l’intérieur à travers la première enquête de Mario Silva et c’est un livre qui va à toute vitesse et qui est empreint de politique sociale et religieuse.

Voilà pour ce mois de février. Le titre de chouchou du mois revient donc, si vous avez bien fait les comptes, à Claire Favan et son Apnée noire (Toucan Noir), un thriller sans une goutte de sang, avec des personnages formidables, une intrigue d’une grande créativité et un style très fluide. Claire Favan a écrit là le roman que tout amateur de thriller va dévorer, et c’est donc en toute logique qu’elle reçoit le titre (honorifique) de chouchou du mois.

Et n’oubliez pas le principal, lisez !

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23 février 2014 7 23 /02 /février /2014 20:14
Fils de Sam de Michael Mention (Ring)

Il est bien rare de trouver sur ce blog mon avis sur des essais, car je préfère les intrigues fictives ; question de gout. C’est donc surtout grâce au nom de son auteur que j’aurais lu de Fils de Sam, et ce roman se lit comme un vrai thriller, avec une enquête des plus rigoureuses.

Quatrième de couverture :

Il a ensanglanté les rues de New York et traumatisé des millions d'Américains. Pour la première fois en France, l'histoire vraie du « fils de Sam ».

Été 1977. L’Amérique croit avoir tout subi : assassinat de JFK, émeutes, fiasco au Vietnam, crise économique. Meurtri dans sa chair et saigné dans ses ambitions, le pays est à genoux. New York aussi, soumise à une canicule sans précédent, au blackout et à son bourreau.

Un tueur mystérieux qui rôde la nuit et décime la jeunesse avec son revolver. Un prédateur unique dans la sphère des tueurs en série, défiant les autorités, les médias et le pays tout entier. Cette affaire criminelle a fait l’objet d’un film, Summer of Sam, réalisé par Spike Lee avec Adrien Brody, mais tout n’a pas été exploré...

Pour la première fois en France, un auteur retrace cette stupéfiante enquête, méconnue en Europe, à travers de nouveaux axes d’investigations. Entre document et thriller, Fils de Sam vous fait revivre la croisade du « Tueur au calibre .44 » à la faveur de nombreux documents et photos qui en font bien plus qu’un livre : un ouvrage qui se lit comme un film, en immersion dans la tête de l’un des tueurs les plus complexes. Une plongée au cœur des États-Unis du rock au disco, du L.S.D. à la C.I.A., d’Hollywood au satanisme… portrait d’une nation à travers l’un de ses exclus, devenu icône des serial killers.

Né en 1979, Michaël Mention est romancier et scénariste. Grand Prix du roman noir français au Festival International du Film Policier de Beaune en 2013 pour Sale temps pour le pays (Rivages/noir), il s’impose aujourd’hui comme l’un des nouveaux prodiges du thriller.

Mon avis :

Ce roman est vraiment particulier, original. D’ailleurs, je l’appelle roman, alors que c’est aussi et avant tout une enquête sur un serial killer qui est encore vivant, purgeant ses six peines à perpétuité pour avoir blessé ou tué plus d’une dizaine de personnes. La forme de ce livre est une alternance entre des chapitres à la première personne qui plongent le lecteur dans la tête malade de ce personnage hors du commun, et des chapitres montrant le contexte, les années 70 avec les sectes nihiliste ou adoratrices du diable, les groupuscules niant le bien pour provoquer des massacres à grande échelle.

De ce contexte, extrêmement documenté, Michaël Mention insiste sur l’un de ses thèmes de prédilection : l’influence de la société sur les hommes, le rôle néfaste des media qui semblent pousser les gens vers des actes meurtriers uniquement pour qu’ils puissent atteindre une notoriété. Mais aussi, il montre une analyse poussée sur la société des Etats Unis, qui manque cruellement de racines, qui est guidée par la religion pour éviter de déraper, mais qui s’avère en fait une gigantesque pompe à fric dont la seule loi est celle de l’argent.

Au passage, je dois noter que, outre une documentation impressionnante, l’auteur ne va pas se laisser aller à faire des hypothèses, à lancer de grandes théories, il va juste poser les faits, issus de sa recherche minutieuse, et poser des questions ou rétablir la vérité connue, ce qui n’est que présomption restant à la porte. La partie documentaire est passionnante, et elle se lit comme un roman.

Et d’ailleurs, les passages écrits à la première personne se lisent eux comme un thriller. C’est un véritable voyage dans un esprit malade, qui commence par un jeune homme sans racines comme son pays, délaissé comme son pays, sans but comme son pays. Et si on peut trouver un peu répétitif la période où David Berkowitz perpétue ses meurtres, l’ensemnle est bigrement cohérent et forme un thriller dans la plus pure des traditions. Et si je vous dis, qu’au long des 385 pages, on finit par se forger un avis, des certitudes, c’est sans compter la réalité (qui dépasse la fiction) car à la fin du livre, on ne sait plus vraiment qu’en déduire de ce personnage réellement hors du commun, qui aujourd’hui, du fond de sa cellule, prêche la bonne parole et a refusé ses procès pour allègements de peine. En fait, on termine le livre en se demandant : Mais qui est-il vraiment ?

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21 février 2014 5 21 /02 /février /2014 17:44
Témoin de la nuit de Kishwar Desai (Editions de l’Aube)

Voilà une idée originale, à saluer de faire découvrir le polar indien. C’est vrai que vu d’ici, de France, il est bien rare de parler de ce pays, et encore moins de savoir ce qui s’y passe ou même de savoir comment les Indiens vivent. Plongée donc dans l’inconnu.

Quatrième de couverture :

Violence au cœur de l’Inde. Une jeune fille de bonne famille est retrouvée, violée et battue, entourée de treize cadavres, dans une immense maison incendiée. La police locale la soupçonne d’être la responsable de cette tragédie. Simran Singh, une travailleuse sociale peu conventionnelle, décide alors d’intervenir. Pour comprendre l’histoire familiale de Durga, Simran dévoile peu à peu un monde épouvantable dans lequel chaque petite fille qui naît n’est jamais sûre de vivre bien longtemps…

« Aucun bon thriller (depuis Millenium) ne s’est révélé aussi érudit, audacieux et fascinant que Témoin de la nuit… Au cœur de ce roman à suspense captivant et complexe se trouvent deux héroïnes énigmatiques…Je vous mets au défi – que vous soyez femme, homme, les deux ou ni l’un ni l’autre – de ne pas l’adorer ! » Abigail Tarttelin, Huffington Post.

« Formidable ! » The Telegraph.

« Un conte triste et stimulant. » The Guardian.

Mon avis :

Quand j’ai commencé ce roman, j’ai oublié qu’il s’agissait d’un roman indien, qui se passe en Inde.

Du coup, j’ai pris pour de la maladresse le premier chapitre qui concerne la présentation de Simran Singh, cette assistante sociale, qui adore se battre pour les causes perdues d’avance.

Du coup, je me suis posé la question, de qui ne s’inquiéterait de la présence de 13 corps dans une maison. Puis la vérité s’est imposée à moi : Dans les pays où le nombre d’habitants est gigantesque, on fait peu de cas des vies humaines.

Du coup, j’ai été réellement surpris que l’on arrête une jeune femme, Durga, retrouvée attachée à son lit sur les lieux des meurtres. A croire qu’on l’arrête uniquement parce que c’est une femme. Et en fait, l’auteure venait de me plonger la tête entière dans son intrigue …

Ce roman est plutôt un roman psychologique qu’un roman policier, car l’intrigue est simple, trop simple pour tenir en haleine. Par contre, la forme de ce roman fait que si le décollage a été brutal (en ce qui me concerne), l’atterrissage l’a été encore plus … brutal. Chaque chapitre est formé de trois parties : L’une est la confession écrite de la jeune femme, puis vient l’enquête de Simran, basé essentiellement sur des rencontres et des interrogatoires. Puis viennent des mails entre Simran et la sœur de Durga, qui à mon avis n’apportent pas grand-chose à l’hitoire (mais ils ne dépassent pas 10 lignes).

Alors on suit cette enquête et le challenge de Simran est d’arriver à nouer un contact avec cette jeune femme emprisonnée, qui a été battue, violée, maltraitée, puis arrêtée et mis en prison par une police autant corrompue que désintéressée de la vérité. Et on finit par s’attacher pour cette jeune fille de 14 ans, qui a eu le malheur de naitre jeune fille dans un pays où les femmes ne peuvent servir à rien dans les champs. Puis, petit à petit, nous allons assister à toutes les horreurs que subissent les femmes en Inde, car il faut bien se rendre compte que leur seule utilité est de se marier pour rapporter une dot à la famille. Tout d’abord, les parents essaient de les tuer (en évitant de les nourrir par exemple). Puis elles sont maltraitées, battues, insultées, torturées, avant d’être violées dès l’adolescence ! Et comme on est devenu proche de cette jeune femme, certains passages sont écoeurants et font mal au cœur !

Voici donc un roman revendicateur, dont le fond et la forme se rejoignent pour former un tout très cohérent, qui se lit très vite. C’est un réquisitoire contre la société indienne actuelle, une histoire écoeurante, qu’il serait dommage de ne pas lire. Ce fut pour moi, en tous cas, un sacré choc !

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19 février 2014 3 19 /02 /février /2014 18:26
Kind of black de Samuel Sutra (Terriciaë)

Attention, coup de cœur !

La dernière page vient de se tourner, les mains de pianiste qui s’immiscent sur la couverture se tendent vers moi. Je prends le roman, l’ouvre au hasard, mais pas tout à fait, attrape un effluve de chapitre et commence (ou plutôt recommence) ma lecture. Je retrouve Jacques, cet inspecteur en vacances, qui plonge dans cette affaire ténébreuse, au fin fond d’une cave enfumée, bercé par une douce musique légèrement nonchalante et infiniment triste.

J’entame à peine les premières phrases du chapitre 21 qu’une musique caresse mes oreilles. D’un accord parfait, d’une introduction musicale d’une douceur inégalée, les phrases débouchent sur une voix, celle de l’auteur, de son amour pour le jazz, de son amour pour les mélodies, pour les histoires de gens. Malgré le fait que je ne sois pas fan de jazz, Samuel Sutra m’a attiré dans ses filets, comme une sorte d’initiation à la vie.

Ce roman, c’est aussi une histoire de personnages. La pierre centrale, c’est Stan Meursault, ce pianiste de génie qui n’est pas reconnu à sa juste valeur, mais que beaucoup admirent dans le milieu. Il est la pierre angulaire du Night Tavern, cette cave au pied de Montmartre où, tous les soirs se déroulent des concerts de jazz. Stan est tiraillé entre sa joie de retrouver Sarah Davis, cette chanteuse partie chercher et trouver la gloire aux Etats Unis et son appréhension de la retrouver après plusieurs années de séparation. Car ces deux là se sont connus, se sont aimés et se sont quittés au nom de la reconnaissance, du succès, de la gloire si éphémère mais si importante.

Sarah Davis a accepté de venir faire un set d’une trentaine de minutes au Night Tavern, en ne chantant que des classiques pour éviter les problèmes de droits d’auteur. Ce sont d’ailleurs les détails que doit régler Baker, l’agent de Sarah Davis et compagnon de la chanteuse. Sarah Davis a aussi permis à Stan d’enregistrer le concert, pour qu’il puisse le vendre à une maison de disque, s’il le veut.

Stan et ses deux acolytes contrebassiste et batteur laisse Sarah Davis dans la loge et montent sur scène. Ils ne voient pas le public, éblouis qu’ils sont par les projecteurs. Stan débute par If you wait too long, la célèbre chanson qui a révélé et consacré Sarah Davis. Il joue comme jamais, ses doigts volant sur les touches du piano, les notes qui sortent du piano semblant rendre hommage à cette chanteuse devenue diva du jazz. L’introduction reste suspendue dans l’air, et plus les secondes passent, plus l’atmosphère devient lourde, pesante. Stan se sent obligé de présenter « La grande, l’immense Sarah Davis … » mais elle n’apparait pas. Le silence tombe, assourdissant cet espace de musique magique ; on entend de l’agitation et la sanction tombe : Sarah Davis a été poignardée.

Je n’oublierai que bien difficilement ces formidables personnages, ni Stan et ses doigts magiques, éternel maudit de la vie, ni Jacques ce policier consciencieux, obligé de travailler en marge de sa passion, la musique ; ni Lisa si belle et si parfaite dans le regard de Jacques ; ni Baker ce personnage si antipathique ; ni les autres collègues de Jacques si bien dessinés, si vivants, si attachants. Je n’oublierai pas cette douce musique portée par le style fluide et entêtant comme une ritournelle, cette histoire racontée comme un morceau de musique, où on prend le temps d’ouvrir le capot du piano, où l’introduction vous prépare au meilleur, où le corps du morceau vous emmène petit à petit, où la fin, la conclusion du morceau vous cloue au poteau, tant c’est beau, noir et imparable. Voilà, je l’ai dit, les dernières pages de ce roman m’ont détruit.

Coup de cœur !

Samuel Sutra décline son talent dans l’humour avec les aventures de Tonton et sa bande : Le pire du milieu, Les particules et les menteurs, et Akhanguetno et sa bande. La quatrième aventure de Tonton vient de sortir aux éditions Flamand Noir et s’appelle Le bazar et la nécessité.

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18 février 2014 2 18 /02 /février /2014 18:21

Ce ne sont pas moins de six sorties qui vont débarquer en force dans vos librairies, trois grands formats et trois rééditions en format poche. Autant de raisons de se pencher sur ces romans qui promettent et font saliver. Et n’oubliez pas le principal, lisez !

L’information du mardi : Jigal revient en force

Tendre comme les pierres de Phiippe Georget :

Dans le village de Wadi Musa, près du célèbre site de Pétra, un vieil archéologue français est arrêté, accusé de pédophilie par la police jordanienne. Venu réaliser un documentaire sur son chantier de fouilles, Lionel Terras, journaliste parisien, irascible et désabusé, va avec Mélanie, l’adjointe du professeur, tenter de découvrir qui cherche à éliminer le vieil homme. Son enquête va le conduire dans le désert du Wadi Rum, sur la piste de l’âme des Bédouins et sur les traces du mythique Lawrence d’Arabie, à la poursuite de l’incroyable secret de Sharat-Aqem… Lionel trouvera-t-il sur la Desert Highway, les réponses à son propre chaos ? Car comme dit le proverbe arabe : « Si loin que portent nos pas, ils nous ramènent toujours à nous-mêmes. »

En trois romans, Philippe Georget a su conquérir un large public et remporter un franc succès – tant en France qu’à l’étranger – grâce à son style direct et à ses intrigues maîtrisées dans lesquelles chacun a la possibilité de trouver des résonances personnelles… Des histoires d’amour (qui ne finissent pas toujours si mal…), des romans noirs et touffus, une réflexion délicatement ciselée, des polars riches et exaltants tout en finesse et précision… D’autant que Philippe Georget a le sens aigu de l’éclectisme : les tueurs en série, le milieu de la boxe, la guerre d’Algérie ! Aujourd’hui, nous voilà embarqués dans un superbe roman d’aventure, à Pétra, dans le désert jordanien, sur les traces de Lawrence d’Arabie, à la recherche de Sharat-Aqem ! Le cadre (grandiose…), l'ambiance (surchauffée…), le contexte (politiquement sensible…), les personnages (avec de la chair, du cœur et des tripes, plus vrais que nature…), l'intrigue (rebondissante…). Tout concourt ici à faire un formidable roman : d'amour, de colère, d'innocence, de rencontres, de liens, de questions, d’incompréhension, de rancœurs, d'héritages culturels et de découvertes, de soi, des autres, des bédouins et du désert… Un grand moment de lecture / plaisir !

L’information du mardi : Jigal revient en force

Trois heures avant l’aube de Gilles Vincent :

Kamel, vingt et un ans, armé pour la guerre sainte, s’apprête à verser le sang de l’ennemi. Bientôt un jeune militaire est sauvagement assassiné dans les toilettes de la gare Saint-Charles à Marseille. Sabrina, trente-cinq ans de déprime et d’obsessions, claque la porte de son HLM de Valenciennes. Un peu plus tard, la complice du pédophile Jean-Marc Ducroix est égorgée en Belgique, aux portes d’un couvent. Grégor, trente ans d’usine, vient de se faire licencier sans autre formalité. Quelques jours après, à Pleucadeuc, le patron de l’entreprise est victime d’un enlèvement crapuleux… Entre peur, folie, rage et désespoir… Trois faits divers, trois parcours cabossés, trois vies brisées. Touchée de plein fouet, la commissaire Aïcha Sadia va, dans cette nouvelle enquête, basculer sous nos yeux, de la force à l'anéantissement.

« Il y a des choses qui, logiquement, ne devraient jamais être en rapport les unes avec les autres, tellement éloignées, tellement sans aucun lien… Mais Gilles Vincent – encore une fois! – nous surprend. » Passion Romans. Et c’est bien de cela qu’il s’agit ici : trois histoires plutôt embrouillées, trois vies plutôt tordues, trois trajectoires rectilignes et un point de fuite ou un point de chute, c’est selon… En lice, et à juste titre, dans de nombreux prix avec ses précédents romans, Djebel ou Beso de la muerte, Gilles Vincent récidive ici l’exploit de nous embarquer pieds et poings liés dans ce nouveau roman sans aucune possibilité de répit. On y prend goût, on y prend plaisir et on en redemande ! Les aficionados retrouveront la belle et charismatique commissaire Aïcha Sadia et son partenaire Sébastien Touraine… Mais ils y redécouvriront surtout le formidable savoir-faire d’un auteur de talent, d’un véritable conteur, capable de donner à ses personnages chairs et âmes, de nous faire ressentir leurs désirs et leurs effrois… De la tragédie, du sang et des larmes pour ce polar bien ficelé, et riche en rebondissements. « Gilles Vincent éclabousse le lecteur d’une myriade d’émotions fortes et vraies. » La Cause Littéraire.

L’information du mardi : Jigal revient en force

La traque de la musaraigne de Florent Couao-Zotti :

Quand Stéphane Néguirec, jeune Breton un brin rêveur, poète à ses heures, amoureux du large et des horizons lointains, débarque à Cotonou, au Bénin, il ne sait pas encore que question dépaysement, il va être servi ! Aux paysages enchanteurs qui l’électrisent, s’ajoutent les charmes des filles aux courbes délicieuses et notamment, ceux de la mystérieuse Déborah Palmer qui lui propose très vite un mariage blanc contre une fortune en billets verts. À l’autre bout de la ville, Jésus Light, un voyou ghanéen, traque sans relâche sa femme, Pamela, partie précipitamment avec le butin de son dernier casse… En temps normal, leurs chemins n’auraient jamais dû se croiser… Mais c’était sans compter sur cette bande de ravisseurs islamistes venus du Nigéria voisin à la recherche d’otages européens…

« Embarqué. À coups de bottes et de crosses dans les côtes. Embarqué. À coups de massue et de poings dans l’entrecuisse. Embarqué, embarqué corps et biens… Embarqué ! » Ça pourrait être le texte d’une chanson-manifeste scandé par Zao, sur un rythme infernal dans une boîte de Cotonou… C’est le nouveau roman de Couao-Zotti, avec Stéphane, le Breton égaré au Bénin, Déborah la mystérieuse séductrice, Jésus Light le truand, Déménageur l’homme de main aux épaules de… Cotonou, ses faubourgs à l’abandon sauvage et son peuple du fleuve… Ça ne se passe pas en mille neuf cent longtemps mais aujourd’hui et maintenant, sur fond géostratégique trouble, dans un décor sentant sévèrement la déglingue et la débrouille. Jouissif, intrépide, âpre et désespéré comme l’homme qui face à la misère est prêt à tout pour exister un jour de plus ! « L’auteur maîtrise à fond son art de la déambulation là où se nouent les rapports de force entre dominants et dominés, tradition et modernité, croyances et politiques. » Livres-Hebdo.

L’information du mardi : Jigal revient en force

Aimer et laisser mourir de Jacques-Olivier Bosco (Poche) :

On dit d’Amanda qu’elle est la femme de tous les hommes… On dit du Maudit qu’il a dormi dans le lit du diable… Entre eux deux, et face au monde de dingues qui les entoure, ça sera à la vie, à la mort… Partis délivrer la sœur d’Amanda séquestrée par un réseau de proxénètes de l’Est, ils vont s’unir, s’aimer, se combattre et affronter le mal absolu, celui que tous surnomment Le Boucher ! Des cartels de Bogotá aux sinistres fermes des environs de Zagreb, des palaces de la côte aux clubs VIP des beaux quartiers parisiens, l’amour sera passionnel, la guerre totale, l’épopée sanglante, les corps cabossés et les âmes meurtries…

Déjà quatre romans – Et la Mort se lèvera, Le Cramé, Loupo – et pour Bosco, c’est un festival de louanges ininterrompue : « remarquable... grosse claque... incantation... coup de poing... déflagration... adrénaline... violent... la poignée dans le coin... rythme énervé... polar noir... » Il nous revient ici en POCHE et en très grande forme avec Aimer et laisser mourir ! On y retrouve – avec un plaisir non dissimulé – le Maudit qui avait laissé une trace sanglante et indélébile sur son premier roman, ET LA MORT SE LÈVERA. Dans ce nouveau polar, on navigue entre Bogotá, ses cartels, son trafic de coke et ses tueurs à gage déjantés, la Croatie et un sordide trafic d’êtres humains – des femmes bien sûr –, Paris et ses caïds corses plus vrais que nature et peu enclins au dialogue, Amanda une call-girl qui n’a vraiment pas froid aux yeux, des proxénètes sanguinaires sans foi ni loi… et Lucas dit le Maudit. Un personnage hors du commun, pour une histoire qui ne l’est pas moins… une histoire très mouvementée et menée de main de maître ! Violente, insolente, décapante… mais si réaliste – comme une plongée du côté obscur de la force – qu’elle en devient effrayante. Une intrigue à la John Woo – on en prend plein la gueule – menée tambour battant, et dont personne ne peut sortir indemne… Du sang, de l’amour, de l’aventure… James Bond n’a qu’à bien se tenir ! Un livre envoûtant, à la tension quasi permanente, une intrigue nerveuse, musclée, une fin d’une noirceur infinie qui vous prend aux tripes et vous laissera séché, vidé et hagard au petit matin… Jouissif et percutant !

Mon avis est ici

L’information du mardi : Jigal revient en force

Sur nos cadavres, ils dansent le tango de Maurice Gouiran (poche) :

Vincent de Moulerin, notable marseillais et conseiller municipal, vient d’être abattu de quatre balles de 11.43 dans un parking souterrain du centre-ville. Emma, jeune lieutenant de police au look étrange se retrouve en charge de l’enquête sur ce meurtre apparemment crapuleux. Mais, suivant son instinct et les conseils de Clovis, elle décide de fouiner dans le passé de la victime… De Moulerin est en effet un ancien colonel des paras qui a fait le coup de feu en Indochine… Il y est devenu un expert reconnu de la guerre antisubversive, appliquée en Algérie et bientôt exportée et enseignée avec succès en Argentine. L’Argentine, où en 76 une clique de généraux prend le pouvoir, instaure la dictature et terrorise le peuple : enlèvements, disparitions et tortures sont alors le lot de tous les opposants réels ou supposés. Et puis il y a Kevin, le petit-fils de Vincent, un ado apparemment disjoncté, qui bien que vivant reclus dans sa chambre et passant sa vie dans Second Life est en train de comprendre beaucoup trop de choses… Mais quel rapport existe-t-il donc entre le Mondial Argentin de 78, l’École de Mécanique de Buenos Aires, Videla et sa junte, les bruits de bottes dans la Médina d’Alger, la Patagonie, les « desaparecidos », Kevin et Vincent de Moulerin… ?

Le génocide arménien, la guerre civile espagnole, les dérives mafieuses, les errances politiques, l’épuration de l’après-guerre, l’Indochine, la guerre d’Algérie, la spéculation immobilière outrancière, les créationnistes… Maurice GOUIRAN, imperturbable et citoyen, poursuit à travers ses romans un gigantesque travail sur la mémoire et surtout contre l’oubli. Dans chacun de ses romans, il aime tirer un fil de l’Histoire, le dérouler avec constance et dextérité, dévoiler, révéler, apporter un nouvel éclairage et faire en sorte qu’aucune chape de silence ne puisse recouvrir définitivement certaines exactions ! Sans haine ni discours superfétatoires mais avec l’impérieuse nécessité de dire, de mettre au jour et de faire en sorte que personne n’oublie JAMAIS… Aujourd’hui, dans ce nouveau roman, Maurice GOUIRAN nous entraîne avec ferveur du côté de l’Argentine, des atrocités commises par la dictature en 1976, des disparus, de la torture, des folles de la Place de Mai. ET, ce qui est peut-être nettement moins connu, il aborde ici le rôle, en service plus ou moins commandé, de certains militaires hexagonaux dans cette tragédie ! Inattendu, cruel et historique… avec l’immense intérêt, non pas de remplacer les livres d’histoire, mais bien au contraire de donner envie de les ouvrir… Dans ces époques troubles ou quand l’Histoire bégaie, il est toujours salvateur de poser quelques repères afin d’aiguiser nos sens… et de nous permettre de garder nos esprits en alerte permanente. INDISPENSABLE !

L’information du mardi : Jigal revient en force

Restez dans l’ombre de André Fortin (Poche) :

En 1943 Da Fonseca, un flic collabo au cœur trouble et desséché, sauve une gamine juive d’une rafle… En 2002, lorsqu’un vieil homme est retrouvé sauvagement assassiné dans une ruelle d’un quartier chic de la ville, c’est tout un pan de l’Histoire de Marseille qui va péniblement se dévoiler aux yeux des enquêteurs… Le juge Galtier, un habitué des cas difficiles, va remonter la piste et le temps, soulever la poussière, provoquer les confidences, entendre les témoins et rouvrir les dossiers particulièrement obscurs de certains personnages ayant su rester dans l’ombre et opportunément profiter de la guerre pour amasser une fortune considérable. Cinquante ans plus tard, les souvenirs sont parfois flous, mais la haine intacte…

Est-ce dans l’Histoire, dans la justice ou dans l’homme qu’il faut chercher le point de départ de ce roman ? Avec RESTEZ DANS L’OMBRE, le juge André Fortin poursuit un inlassable travail de questionnement sur la justice, qui nous permet – si on le désire – de ne pas prendre pour argent comptant n’importe quelle vérité. Le « héros » est ici un salopard, un collabo, aucun doute là-dessus. La victime, ses victimes, sont des jouets entre ses mains, ça ne fait aucun doute non plus et c’est insupportable ! Quant à l’Histoire… ici le décor, c’est la guerre, la souffrance des uns, la collaboration pour d’autres, le tout réuni en un véritable musée des horreurs donc. L’Histoire, l’homme, la justice… une trilogie sacrée qui, de par le monde, génère bien souvent chaos et confusion ! Mais ici tout vous prend à contre-pied : le salaud en est un, mais pas seulement, l’innocent ne le sera peut-être pas toujours… et la justice au milieu de tout ça cherche sa voie et surtout une vérité bonne à dire. Il arrive même parfois que plusieurs générations paient le prix fort pour une vérité que la justice n’a pas pu ou voulu révéler !

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16 février 2014 7 16 /02 /février /2014 18:11
Le sang des maudits de Leighton Gage (Points Seuil)

Retenu dans la sélection de Meilleurpolar.com des éditions Points Seuil, ce roman est à la fois l’occasion de découvrir un nouvel auteur et le Brésil des villes, pas celui des grandes villes mais des moyennes villes. Partout, le crime a gangréné la vie mais le sujet de ce roman n’est pas là.

Cascatas do Pontal, Brésil. L’évêque Dom Felipe débarque en hélicoptère pour l’inauguration d’une nouvelle église. Lui qui déteste ce moyen de transport doit se plier à l’organisation de son secrétaire. Balayé par le vent, le tarmac l’attend, encombré de journalistes. Alors qu’il pose pour les photographies, il est abattu de plusieurs balles par un tireur d’élite.

Mario Silva est inspecteur dans la police fédérale. Alors qu’il se destinait à une carrière d’avocat, l’assassinat de son père et le viol de sa mère l’ont motivé à s’engager dans la police pour retrouver les meurtriers de ses parents. Son neveu Hector a connu le même drame. Mario Silva l’a élevé et naturellement pris sous son aile dans la police. L’assassinat de l’évêque va constituer leur priorité, sous la pression de leur hiérarchie et du gouvernement.

Le début de ce roman est génial. Car il y a dans les cent premières pages tout ce que j’attends d’un polar. On y a affaire en effet à l’enquête policière, du moins son début, en alternance avec une partie de la biographie de Mario Silva. Et dans ces premières pages, Leighton Gage nous montre sa façon de faire : des chapitres courts, des phrases ciselées et des dialogues efficaces.

Car cela va vite, très vite. L’auteur ne perd pas de temps dans des descriptions sans fin, il a opté pour un style direct, franc ; c’est un homme pressé. Il n’est pas utile de chercher des traits psychologiques appuyés, tout est dans les actions ou les dialogues des personnages. Après 100 pages, alternant entre présent et passé, Leighton Gage a non seulement situé ses personnages mais aussi le contexte. Et si on peut penser que quelques considérations sur le Brésil en général manquent, vous les trouverez en fin de roman.

Bref, tout est là pour passionner le lecteur. Et en l’occurrence, après avoir fait connaissance avec Mario et Hector, nous apprenons le contexte du roman. Après la dictature, l’état a décidé de redonner ses terres au peuple, ou du moins de lui vendre. Sauf que, avec quelques malversations, ce sont des hommes ultra riches qui ont récupéré toutes les terres, laissant aux plus pauvres leur rêve d’une terre à eux. Le conflit s’engage donc entre le mouvement des Sans Terre et la ligue des propriétaires terriens brésiliens. Là où Leighton Gage va plus loin, c’est qu’il inclut la religion catholique dans ce conflit, avec leur position un peu du coté des pauvres mais beaucoup du coté des riches.

Ce conflit va nourrir le roman, que ce soit ouvertement au travers de conflits armés entre eux ou avec la police, ou plus sournoisement au travers de dialogues avec les différents protagonistes. Car n’oublions pas que c’est tout de même un roman policier, et que l’intrigue avance essentiellement grâce aux différents interrogatoires.

Ce qui est remarquable aussi au travers de ce roman, c’est la violence sous jacente que les gens vivent au quotidien. Si nos policiers ne la ressentent pas trop, ou n’en parlent pas trop, ce qui arrive aux personnages périphériques est bien souvent terrible et le lecteur que je suis s’est souvent senti abattu devant tant d’animalité et d’amoralité envers des pauvres gens qui n’ont rien demandé.

Finalement, ce roman s’avère un très bon roman policier, parfois un peu long, mais qui aura l’audace et le courage de nous montrer la vie des Brésiliens lambda comme vous et moi, et de suffisamment vous plonger dans le contexte pour vous faire sentir toute l’horreur de vivre là bas. Si l’auteur a longtemps vécu là bas, c’est remarquable d’avoir réussi à nous plonger dans leur quotidien et de nous avoir informés, alertés sur la situation de ce pays. Voilà une excellente découverte.

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12 février 2014 3 12 /02 /février /2014 18:13
Les chiens de Belfast de Sam Millar (Seuil Policiers)

Je ne dirai jamais assez tout le bien que je pense de Sam Millar, de l’univers qu’il créé, de son style si imagé, de ses scènes si violentes et frappantes. Les chiens de Belfast va nous permettre de faire connaissance avec son nouveau personnage qui, une fois n’est pas coutume, est un personnage récurrent. Les chiens de Belfast est en effet la première enquête d’une trilogie.

Karl Kane, voilà un nom qui frappe, deux syllabes qui cognent comme deux balles de revolver. Karl Kane est détective privé à Belfast, le meilleur, celui vers qui se tourne car il est doué pour résoudre des affaires inextricables, mais aussi parce qu’il est discret. C’est un personnage qui, de prime abord, n’est pas torturé, mais il a quelques petits problèmes de santé, essentiellement d’hémorroïdes. Il est aussi divorcé, a une fille qui lui demande tout le temps de l’argent, a un père qui perd la tête et a une liaison avec sa jeune et belle secrétaire Naomi.

Un matin, un client débarque dans son bureau alors qu’il est en train de se passer de la pommade pour calmer ses douleurs de fondation. Bill Munday lui demande de se renseigner sur un cadavre retrouvé au jardin botanique. Karl Kane va voir son ex-beau frère Mark qui travaille en tant qu’inspecteur de la police. L’homme, Wesley Milligan, a été abattu de trois balles dans la tête. Sa nature violente fait qu’il pourrait avoir beaucoup d’ennemis. Quand un deuxième meurtre apparait, Bill Munday lui demande de lui donner les noms des prostituées travaillant dans le coin et qui auraient pu rencontrer le deuxième défunt. Karl Kane va avoir affaire à une enquête particulièrement tortueuse, dont les causes pourraient bien se trouver dans le passé des victimes.

Si ce roman apparait comme une introduction pour cette trilogie, l’intrigue est particulièrement bien faite. Sam Millar sème par ci par là des indices, qui ne seront assemblés qu’en fin de roman grace aux incroyables qualités de déduction et à une certaine faculté à bluffer de Karl Kane, mais je ne vous en dit pas plus.

On retrouve dans ce court roman toute la puissance évocatrice de Sam Millar, capable de créer des scènes ultra violentes et parfaitement visuelles. Encore une fois, on ne peut que louer le travail du traducteur qui a su rendre hommage à ce style à la fois direct et visuel de l’auteur. On est aussi toujours ébahi par l’humour qui transparait dans les dialogues, même dans les scènes les plus tendues, ddans les moments les plus difficiles, de l’humour froid, noir qui vous arrache un sourire jaune … ou noir.

Quant à l’histoire, elle est à la fois complexe et simple, mais la conclusion pleine de menaces et d’amoralité comme on les aime dans les meilleurs romans noirs. Les fans de romans policiers y trouveront leur compte, les fans de romans noirs y trouveront leur compte, les amateurs de polars irlandais seront confirmés dans leur idée que Sam Millar est un grand, et que même si l’histoire est moins imprégnée de l’Histoire de l’Irlande ou de celle de l’auteur lui-même, ce roman s’avère un excellent polar à placer sur le haut de la pile. Vivement que l’on puisse lire la deuxième enquête de Karl Kane.

Vous trouverez mes avis sur les romans de Sam Millar : Poussière tu seras, On the brinks et Rouge est le sang.

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